Alain de Benoist ayant rappelé, à la fin de la campagne européenne, tout ce qu’il devait à Louis Rougier [1] nous proposons ici un parallèle assez éclairant nous semble-t-il entre Rougier et Monnet. Le Glaive de la Colombe prévoit de revenir prochainement sur « cet étrange Monsieur Rougier » ainsi que sur la conception européenne de la « Nouvelle Droite ».
Louis Rougier nait en 1889. Il est l’un des six enfants d’une famille lyonnaise dont le père médecin est chevalier de l’ordre de Saint-Grégoire-le-Grand, une distinction accordée par le Saint-Siège. Réformé en 1914 (pleurésie contractée à 6 ans), il passe l’agrégation de philosophie en 1915, enseigne dans divers lycées (Gap, le Puy-en Velay, Aix, Alger) puis, en 1920, obtient un doctorat pour sa thèse Les paralogismes du rationalisme. Sans doute jouit-il d’un certain entregent car il intègre, de 1921 à 1922, le lycée français de Rome et dirige aux éditions André Delpeuch la collection Les maîtres de la pensée antichrétienne (renommée ensuite plus bénignement Civilisation et christianisme). En 1924, il est nommé à l’université de Besançon, un poste peu astreignant car remarque Pascal Engel [2] « il ne semble pas y avoir passé beaucoup de temps ». De fait, de 1934 à 1936 il enseigne à l’Université royale du Caire [3]. En 1932 Anatole de Monzie, ministre de l’instruction publique, le missionne en URSS. En 1934 la Fondation Rockefeller [4] lui commande une enquête sur les intellectuels en Europe centrale. Il aurait, semble t-il, également obtenu d’Alexis Léger une mission à Berlin que la « nuit des longs couteaux » rendit inutile [5]. De 1935 à 1937 il enseigne à l’Institut universitaire des hautes études internationales à Genève dont le directeur actuel semble en relier la création en 1927 à celle de la Société des Nations [6]. Durant ces années 1930, notre professeur de philosophie, décidément infatigable, va déployer en outre une « activité effrénée portant essentiellement sur des questions politiques et économiques » (P. Engel). Entré en relation avec les économistes du Cercle de Vienne (plus tard Société du Mont Pèlerin) von Mises, Hayek, Schlick etc. il en devient le principal relais en France. Ce qui « le rapproche de certains cercles du pouvoir et du patronat » et « le place au cœur d’un groupe influent d’économistes, de politiques et d’intellectuels oeuvrant pour le renouveau du libéralisme » (P. Engel). Pour autant, il ne cesse d’écrire articles et pamphlets et fonde en 1937 la Librairie de Médicis que dirige Marie-Thérése Génin (futur membre de la Société du Mont Pèlerin) et qu’il vouera à l’édition des théoriciens d’un libéralisme intransigeant. Tout ceci le désigne pour organiser, en 1938, à Paris, un colloque qui fit date sur Walter Lippmann dont vient de paraitre La Cité libre. Ce journaliste américain développe à partir du libéralisme des considérations qui méritent qu’on s’y arrête pour mieux comprendre Louis Rougier.
Walter Lippmann (1889-1974) nait dans une famille juive aisée restée très attachée à ses racines allemandes. Très proche de la Fabian Society, grand ami de Jean Monnet, c’est un chroniqueur politique influent. Il est à ce titre membre de la commission Creel que le président Wilson a chargé en 1917 d’élaborer les moyens d’amener l’opinion américaine réticente à accepter d’entrer en guerre. Il y côtoie Edward Bernays (1891-1995) qui, combinant les travaux de son oncle Freud et Psychologie des foules de Gustave Le Bon, a mis ses talents, selon ses propres mots, au service « de la fabrication de l’opinion publique par la propagande afin de permettre à la minorité intelligente de diriger la foule par un gouvernement invisible » (cité par P. Hillard [7]). Pour sa part Rougier écrivait dans sa thèse : « La représentation nationale doit confier à des minorités compétentes triées de la masse de la nation le soin de résoudre les problèmes » (cité par Berndt et Marion) [8]. Plus direct, Lippmann considère le peuple comme un « troupeau irrationnel sans but » et le citoyen de base comme « un intrus ignorant qui se mêle de tout » (cité par P. Hillard) . Dans son livre Public opinion (1922) il parle de la « fabrique du consentement » comme d’un outil indispensable, une idée au moins aussi vieille que le cheval de Troie. Comme on sait, les sous-produits de cette fabrique sont les réalités faussaires dites en version moderne fake news, false flag, narrative….« Nous sommes un empire maintenant et lorsque nous agissons nous créons notre propre réalité » (Karl Rove [9]).
Dans sa thèse, Rougier définissait ce qu’il appelle sa mentalité comme celle de « la fraction instruite de l’élite civilisée de la branche occidentale des Aryens » (cité par Berndt et Marion). Dans le même esprit Lippmann déduit de la fameuse « destinée manifeste » des USA un devoir d’exporter « les valeurs progressistes et démocratiques » (cité par P. Hillard) moyennant quoi il collabore à The Enquiry, un service de renseignement dédié à cette mission, puis au Council of Foreign Relations (CFR) qu’on ne présente plus. Il sera un chaud partisan du Plan Marshall et de la création de l’Union Européenne made in America comme l’ont désormais établi des travaux sérieux. Dans Le grand échiquier, Z. Bzrezinski confirmait en 1997 son utilité pour les USA. Le libéralisme menant décidément à tout, l’exercice de cette police globale américaine s’est traduit entre 1946 et 2000 par 81 ingérences dans des élections de pays tiers [9] et, exception faite des années 1976, 77,78, 97 et 2000, l’organisation de maints regime changes plus ou moins bien identifiés soit par opérations militaires ouvertes soit sous-traités à des « proxies » ou des sociétés militaires privées.
Lippmann était grand ami de Jean Monnet, occurrence qui incite à mettre en regard l’itinéraire de Monnet et celui de Louis Rougier. Ce fils d’un négociant en cognac nait en 1888. Comme il n’est pas porté sur les études, en 1904, son père l’envoie à Londres pour l’entreprise familiale. En dépit de ses 16 ans il va intégrer le très influent réseau de lord Alfred Milner [10] (encore un proche de la Fabian Society). Il est vrai que Milner est le fils spirituel de Cecil Rhodes [11] qui préconisait la sélection de jeunes gens prometteurs. Bruno Riondel [12] écrit de lui qu’il est « pétri d’un idéal de suprématisme anglo-saxon et de gouvernance technocratique mondialisée ». Un idéal que Monnet a fait sien. Il écrira dans ses Mémoires : « Les nations souveraines du passé ne sont pas le cadre où peuvent se résoudre les problèmes du présent » (cité par Bruno Riondel). En 1906, à 18 ans, il part sur contrat de la Hudson’s Bay Co [13] sillonner le Canada (Milner va y créer une demi douzaine de « think-tanks », les « Round tables groups »). Il voyage également aux Etats-Unis où il noue des liens durables avec les sphères de pouvoir. En 1914, il échappe à la mobilisation pour des raisons inconnues. Me Bénot, l’avocat de son père, l’introduit auprès de son « frère » en loge, René Viviani, président du Conseil. Suite à quoi, il se voit confier à 26 ans, la coordination pour la durée de la guerre du ravitaillement de la France et de la Grande-Bretagne (la Hudson’s Bay Co obtient le monopole du blé et du fret). En 1919, la Société des Nations souhaitée par Milner voit le jour. Monnet en est l’un des secrétaires généraux adjoints avec toutefois des prérogatives que n’ont pas les trois autres. Il démissionne en 1923 et entame alors une carrière d’homme d’affaires et de financier à laquelle le soutien de la banque Lazard ne fera jamais défaut.
En 1939, la guerre qui débute incite Monnet à défendre auprès de Churchill un projet de fusion France-Grande-Bretagne (un seul parlement et une seule armée). Il passe la guerre à Londres où il anime une opposition déterminée à De Gaulle [14] En 1943, dans un discours au Comité de libération nationale, il expose « ses projets pour l’Europe [qui] intègrent la création d’une unité économique européenne » où les produits américains serait exonérés de taxes. Cette même année Roosevelt qui mise sur Pétain car l’empire colonial de la France l’importune, le mandate à Alger auprès du général Giraud. Rendant compte de sa mission, Monnet écrit à Harry Hopkins, principal conseiller du président US : « il faut se résoudre à conclure que l’entente est impossible avec lui [De Gaulle] ; qu’il est un ennemi du peuple français et de ses libertés, qu’il est un ennemi de la construction européenne, qu’en conséquence il doit être détruit » . De Gaulle ne fut pas « détruit » et la France échappa à l’AMGOT [15]. Rien n’empêche cependant Monnet de devenir à la Libération commissaire au Plan pour la reconstruction de la France. Il dispose des crédits du Plan Marshall et s’inspire bien sûr du modèle américain notamment pour le « remodelage » du Languedoc. A partir de 1950, il est l’incontournable éminence grise de l’Union Européenne en gestation [16]. Une trentaine de prix et de distinctions lui seront décernées au titre de Père de l’Europe. De nombreux lieux publics lui sont dédiés et une Fondation Jean Monnet à Lausanne veille sur sa mémoire. Il meurt en 1979.
Force est de constater que même si l’activité de Rougier se déploie sur un plan différent et parait de moindre envergure, elle n’est pas sans présenter des points communs avec celle de Monnet. Du moins jusqu’à la Seconde guerre mondiale où Louis Rougier va prendre une direction singulière. En septembre 1940, aussi bien introduit auprès du gouvernement de Vichy qu’il l’avait été auprès du gouvernement Daladier (lequel, soit dit en passant, avait procédé à des achats d’armes par l’intermédiaire de Monnet) « il soumet au Maréchal l’offre de tenter de son propre chef une tractation auprès du gouvernement britannique (Vichy ne conclurait pas de paix séparée et Londres ne toucherait pas aux colonies françaises) auprès duquel il se faisait fort d’avoir des recommandations valables » (P. Engel). Il sera reçu par Lord Halifax, ministre des affaires étrangères britannique mais la signature de l’armistice annihile la démarche. Rougier part alors aux USA. Il y passera la guerre, dirigeant jusqu’en 1945 un journal en langue française Pour la victoire. Dès le mois d’août la Fondation Rockefeller lui avait proposé un contrat de deux ans à la New school for social research à New-York. Confronté à l’hostilité des exilés acquis à De Gaulle, en 1941 il quittera ce poste pour le Saint John College d’Annapolis (Maryland) puis la Faculté des sciences sociales de Montréal. Revenu en France à la Libération, Rougier campera sur ses positions. Ainsi que l’écrit Pascal Engel « la lutte contre De Gaulle et le gaullisme a occupé une part importante dans [son] itinéraire ». Il est suspendu en 1948 de son poste à Besançon dont il n’a pas cessé d’être titulaire depuis 1924. En 1954 il sera réintégré à l’université de Caen.
Antigaulliste, Rougier s’attire la sympathie des tenants de l’Algérie française. Libéral, anticommuniste et atlantiste, il a tout pour plaire à la droite en ce temps de « guerre froide » (encore une expression de Lippmann). Le Figaro, La Revue des deux Mondes, Spectacle du Monde entre autres, lui ouvrent leurs colonnes. Olivier Dard [17] observe que nombre de plumes de ces organes de presse témoignent de la « porosité » avec des mouvances plus radicales, telles que la Fédération des Etudiants nationalistes (FEN), Europe Action, Occident… Ce qui ne semble pas effaroucher Louis Rougier qui dans les années 60, par le truchement de la revue de la FEN, Les Cahiers universitaires, se lie avec Alain de Benoist, futur maître à penser de cette Nouvelle Droite qui se désigne elle-même comme une société de pensée et l’on sait depuis les travaux d’Augustin Cochin qu’il faut entendre par là une machine d’ingénierie sociale [18]. Le mouvement débute par la création en 1969 du GRECE (Groupement de recherches et d’études sur la civilisation européenne). Ses fondateurs viennent de la FEN, voire d’Europe-Action – dont les bases doctrinales sont largement reprises – tel Jacques Bruyas lequel ne cache pas un dessein subversif [19]. Telle quelle, la chose va intéresser Rougier au point que Pierre Vial peut écrire : « Il fut probablement le premier parmi nos aînés à nous manifester de la sympathie, à participer à nos séminaires et à guider nos pas » (cité par Olivier Dard).
De fait Rougier figure sur la liste des collaborateurs du GRECE. Il fait partie du comité de patronage de Nouvelle école, l’une des revues dont le groupe peut très vite se doter. Il y donne des articles ainsi que dans la revue Eléments. La maison d’édition que fonde le GRECE (édition Copernic jusqu’en 1976 puis édition. du Labyrinthe) réédite ses œuvres qu’Alain de Benoist préface. Rougier meurt en 1982. En 2002, de Benoist publie Louis Rougier, sa vie, son œuvre (Cercle Renan). Il lui dédiera ces lignes : « Devant une œuvre d’une telle puissance, d’une telle ampleur, d’une telle continuité, on est saisi de stupeur admirative, de l’enchantement propre à la contemplation des grands monuments de l’histoire et de l’esprit. Il y a des maîtres à penser, des idées très chères, des professeurs et des enseignements dignes d’admiration mais il y a aussi de plus en plus rares, il est vrai, des maîtres » (cité par Olivier Dard). Pareille apologie laisse perplexe car « dès ses origines, écrit Olivier Dard, le GRECE est un adversaire virulent du libéralisme économique, de la société marchande et du monde anglo-saxon, toutes choses qui définissent intellectuellement et politiquement Louis Rougier ». Néanmoins les deux parties ont un objectif commun : l’extinction du catholicisme. Il faut croire que d’aucuns jugèrent cette convergence plus essentielle que des divergences pourtant sévères.
La figure du rationaliste christianophobe est un classique et Rougier est un modèle du genre. S’étant découvert une vocation d’apologiste antichrétien, il publie en 1925 Celse, le conflit de la civilisation antique et du christianisme primitif. On sait peu de chose de Celse, auteur grec du 2ème siècle. Sa charge contre les chrétiens, Le discours vrai, a disparu et n’est connue que par ce qu’en dit Origène, un siècle plus tard dans son Contre Celse. En toute rigueur, la réfutation d’Origène fait apparaitre que Celse ne sait pas grand-chose d’autre sur le sujet que les rumeurs malveillantes qui courent à son époque. Le travail de Louis Rougier a consisté à mettre les mentions d’Origène en style direct puis à les agencer pour donner une cohérence au texte, quitte à y ajouter un paragraphe de son cru (89). Il s’agit donc d’une reconstruction sans aucun recul ni prise en considération des rectifications possiblement éclairantes d’Origène. A de Benoist n’en a pas moins qualifié ce travail que le GRECE rééditera, de « document unique pour l’histoire de l’Occident ». On voit par là qu’un rationaliste engagé (enragé ?) peut tout à la fois abominer le christianisme et se faire directeur de conscience chez les prêcheurs du paganisme.
En ce qui regarde le GRECE, dès ses débuts, outre les points énumérés par Olivier Dard, il s’est aussi posé en « adversaire virulent » du christianisme. Dans un mémoire a ce sujet, Olivier Moos [20] évoque « l’éclatement idéologique apparent des écrits dont la diversité dissimule en réalité une sorte de mythe fondateur moteur premier de l’antichristianisme ». Lequel mythe peut se résumer ainsi : « le dieu des chrétiens est mort et son cadavre n’en finit pas de se répandre. Sous des noms les plus divers les valeurs chrétiennes ont tout infecté ». (A de Benoist, revue Eléments n° 36). Entre autres amabilités le christianisme est « un poison », « un dire-non à la vie ». Pour avoir traitreusement remplacé l’aimable foule des dieux païens par un Dieu unique, malsain et de surcroît sémite, la christianisation fut une « catastrophe ». Tout était déjà dans le Celse de Rougier, observe-t-on. Cependant on ne détruit bien que ce qu’on remplace. Les idéologues de la Nouvelle Droite ont donc entrepris de convaincre les Européens de renouer avec le paganisme antique. Ainsi seront conjurées les menaces qui pèsent sur leur civilisation débilitée par 2000 ans de catastrophe. Le storytelling élaboré à cet effet qui taxe le christianisme de tous les vices et pare le paganisme de toutes les vertus doit plus au nationalisme romantique des philosophes allemands qu’à la vérité historique. Tout ça pouvant paraitre passablement défraichi est repeint en « néo paganisme ». Pas question de jouer les « druides d’opérette » dit A. de Benoist : « Ce que nous cherchons derrière le visage des dieux et des héros ce sont des valeurs et des normes » [21]. Un peu abscons peut-être pour le commun des mortels. Avec le temps, le discours s’est fait moins agressif sans doute pour ne pas prendre de front cette part grandissante des jeunes générations qui, en quête d’identité, manifeste un intérêt inattendu pour ce christianisme que l’on s’acharne à débouter mais qui a fait la France. Qu’on le veuille ou non.
A l’évidence le cadavre bouge encore et les troupes de l’Infâme relèvent la tête. Le réveil des nations est un mouvement de fond dans les pays européens. Or face à l’impérialisme de l’Union Européenne qui refusa de se reconnaitre des racines chrétiennes, certains chefs d’Etat n’hésitent plus à lier explicitement souveraineté politique et identité chrétienne Pour Monnet le cadre national était dépassé. Mieux encore Edmond de Rothschild y voyait un « verrou » qu’il fallait faire sauter (L’entreprise 18 juillet 1970). Les néo païens aussi. Ils sont pour toutes les identités locales qu’on veut et pour l’Europe. Et entre les deux, rien qui vaille. La Patrie majusculaire, autrement dit la France, son identité propre, sa défense possiblement prioritaire ne fait pas partie de leur problématique. Alain de Benoist s’en explique laborieusement dans un long article intitulé Europe, l’Idée d’empire [22]. On y lit des choses étonnantes. A grand renfort de demi-vérités historiques, voire de vrais bobards, il énonce doctement que l’idée de nation est récente (Jeanne d’Arc un alien ?), que le parti-pris de « pré-carré » a conduit la monarchie qui ne se distingue pas de la république jacobine, à étouffer tout particularisme [a parte : le ministre Calonne disait peu avant 1789 « on ne peut faire un pas dans ce vaste royaume sans y trouver des lois différentes, des usages contraires, des privilèges, des exceptions » auxquelles Révolution mettra fin]. L’empire, par contre, notamment parce qu’il n’est pas territorial (?) mais principe spirituel (??) est seul à même de respecter « les cultures régionales, les ethnies minoritaires, les autonomies locales » comme en témoigne le Saint empire romain germanique d’heureuse mémoire. A. de Benoist appelle donc de ses vœux la constitution d’un empire européen de type fédéral car « l’Europe a besoin pour exister d’une unité politique ».
En 1988 le président Mitterrand fit transférer les restes de Monnet au Panthéon sur le fronton duquel on peut lire : « Aux grands hommes la patrie reconnaissante ». Or il se trouve qu’au détour d’un débat (Ce soir ou jamais 11 mai 2013), Marie-France Garaud, dont la carrière politique ne permet pas de négliger les propos, nous a appris que des documents déclassifiés établissent que Jean Monnet fut « un agent américain payé pour détruire les états européens ». [23]
Je dis ça…je dis rien…
A. de P.
[1] TV Libertés, Cette année-là n° 11 : « 1977 l’année de la droite ? »
[2] Pascal Engel, « Vies parallèles : Rougier et Cavaillès », Philosophia Scientiæ [En ligne], CS 7 | 2007, mis en ligne le 08 juin 2011, consulté le 01 juin 2019. URL : http://journals.openedition.org/philosophiascientiae/428 ; DOI : 10.4000/philosophiascientiae.428
[3] En 1922 les Anglais mettent fin à leur protectorat sur l’Egypte et installent une monarchie. Ils gardent la haute main sur le canal de Suez et restent omniprésents. L’œuvre de Laurence Durell, Le quatuor d’Alexandrie, donne une assez bonne évocation de l’époque.
[4] La Fondation Rockefeller est un cas emblématique des activités philanthropiques auxquelles les grandes fortunes américaines croient devoir s’adonner à partir des années 1890. « Dés le début du 20ème siècle les plus grandes de ces fondations élaborent une politique mondiale liant étroitement la certitude d’incarner l’intérêt général et la volonté de diffuser un modèle américain » (Ludovic Tournés, La fondation Rockefeller et la naissance de l’universalisme philanthropique américain, https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00652589/document)
[5] http://graduateinstitute.ch/fr/home/about-us/message.html / le mot du directeur).
[6] L’épisode est relaté dans la préface d’A de Benoist à la réédition du livre de Rougier La mystique démocratique (1983). Alexis Léger alias le poète Saint-John Perse. Diplomate de carrière et germanophile. En 1929, mandaté par l’assemblée générale de la Société des Nations il rédigea pour Aristide Briand un Memorandum sur l’organisation d’un régime d’union fédérale européenne. Secrétaire général du ministère des affaires étrangères en 1933 il sera révoqué en 1940 par Daladier et part aux USA. Antigaulliste « il est peut-être avec Jean Monnet le seul Français qu’accepte d’écouter Roosevelt » (cf André Béziat, Franklin Roosevelt et la France (1939-1945) : la diplomatie et l’entêtement, L’Harmattan, 1997, p. 239, cité par Wikipédia) . Il se marie à une américaine, reçoit en 1960 le prix Nobel de littérature et se retire à Giens (Var) dans la propriété d’amis américains.
[7] Pierre Hillard, Atlas du mondialisme, Le Retour aux sources, 2017 http://tempospdflivres.tk/atlas/atlas-du-mondialisme-ean-2355120803/
[8] Claudia Berndt, Mathieu Marion. Vie et œuvre d’un rationaliste engagé : Louis Rougier (1889-1982). Philosophia Scientiae, Tome 10 (2006) no. 2, pp. 11-90. http://www.numdam.org/item/PHSC_2006__10_2_11_0/
[9] Karl Rove, sénateur du Texas, principal conseiller des présidents Bush père et fils. Propos tenu à Ron Suskind éditorialiste du Wall Street Journal qui l’a rapporté dans le New York Times en novembre 2004.
[10] Dov H. Levin When Great Power Gets a Vote : The Effects of Great Power Electoral Interventions on Electoral Results –International Studies Quarterly juin 2016. Dans une interview (Fox news 16 février 2018), James Woolsey directeur de la CIA de 1993 à 1995 a reconnu les faits.
[11] Alfred Milner homme d’état britannique né en 1854 à Gliessen (Allemagne) mort en 1925 à Cantorbery (Angleterre). Etudes à Tubingen puis à Oxford où une communauté de vue le lie à Cecil Rhodes . A savoir que l’excellence anglo-saxonne désigne l’Angleterre et les USA à la gouvernance mondiale (Confession de foi Cecil Rhodes). Fortune faite dans le diamant d’Afrique du sud, Rhodes devient Ier ministre de la province du Cap (1890-1896). Milner qui en deviendra ensuite le gouverneur, suscitera la guerre avec les Boers (leurs états interrompent la liaison Le Caire- Le Cap et il y a de l’or au Transvaal) durant laquelle il inventera les camps de concentration. Il poursuivra le projet de Rhodes d’assurer l’avenir de jeunes gens prometteurs soigneusement sélectionnés (Histoire secrète de l’oligarchie anglo-américaine (2015) que l’auteur, Carroll Quigley, historien diplômé de Harvard et professeur à l’université de Georgetown, n’a pas voulu publier de son vivant)
[12] Cecil Rhodes (1853-1902) homme d’affaires et homme politique britannique. impérialiste fervent.
[13] Bruno Riondel, Cet étrange monsieur Monnet, Ed. du Toucan, 2017 et conférence au Cercle Aristote
[14] Hudson’s Bay Co. Entreprise créée en 1670 par le roi d’Angleterre avec monopole du commerce des fourrures du Canada. A l’instar de la compagnie des Indes orientales créée en 1600, cette compagnie au-delà de l’activité commerciale est en quelque sorte une « opex » de la couronne britannique pour contrer la présence française et construire l’empire colonial britannique. De ce fait elle dispose de larges délégations de pouvoir en matière administrative, de troupes et de services de renseignement. La banque Lazard Bros est son partenaire financier.
[15] « Je combats aux côtés de l’Angleterre mais non pour le compte de l’Angleterre » dira De Gaulle à Churchill qui traduira immédiatement : « Non content de lutter contre l’Allemagne, l’Italie et le Japon, vous voulez aussi combattre l’Angleterre et l’Amérique » (en clair : refuser de n’être que nos « bottes sur le terrain » comme on dirait aujourd’hui c’est être contre nous). L’antigaullisme de Roosevelt qui se cache mal de vouloir expulser la France de son empire colonial sera virulent .
[16] AMGOT (Allied Military Governement of the Occupied Territories) est le nom d’un plan conçu par Washington dès 1941 qui prévoit de traiter la France sur le même pied que les futurs vaincus Allemagne Italie, Japon. A savoir un statut de protectorat sous gouvernement militaire américain avec tous pouvoirs. Tel le général Mac Arthur au Japon. Voir Eric Branca L’ami américain, ed. Perrin 2017
[17] Walter Hallstein (1901-1982). Cet Allemand professeur de droit accompagna Hitler à Rome en 1938 pour mettre au point le projet de la Neue Europa destiné à supprimer les frontières pour agréger politiquement et économiquement les états sous la tutelle de l’axe Berlin-Rome. Fait prisonnier en 1944 par les Américains à Cherbourg, il attendra la fin des hostilités aux USA. En 1958 il sera le premier président de la Commission européenne.
[18] Olivier Dard « Louis Rougier itinéraire intellectuel et politique », cité par Pascal Engel, supra
[19] Denis Sureau « Redécouvrir Augustin Cochin » in La Nef n°303 mai 2018
[20]« Une fois armé chacun d’entre nous peut s’orienter dans la direction lui paraissant la plus propre à lui fournir une parcelle de pouvoir dans notre communauté d’hommes. Mais cela faisant il n’est pas tenu, et dans certains cas, il ne lui est pas conseillé de dévoiler en tout ou en partie les idées du GRECE. C’est donc en fonction de l’opportunité qu’il s’attaquera à infiltrer nos concepts, nos règles, notre vision. C’est cela le propre d’une société de pensée », Jacques Bruyas, Association GRECE Eléments mai 1969, p. 15
[21] Olivier Moos Les intellectuels de la Nouvelle Droite et la religion
[22] Alain de Benoist, Comment peut-on être païen ? Albin Michel, 1981
[23] https://metamag.fr/2017/10/04/alain-de-benoist-europe-lidee-dempire/