De l’Église managériale : Église verte ou le catho-bobo labellisé

Nouvelle inconséquence d’une « pastorale » catholique surfant sur la vague de la modernité (quitte à s’écraser sur le roc de la réalité) : la conversion écologique. L’Église, à la suite du pape François et de son encyclique Laudato Si, est en effet engagée dans une « croisade » (sic) écologique. Il n’est plus ici question de se convertir au Christ, à la radicalité de l’Évangile, nous préparant ainsi à la vie céleste dans le sein du Père, mais de se conformer à la vie terrestre, dans une communion avec la terre-mère, la (trop) fameuse Pachamama, qui n’est autre qu’une déesse païenne.
Au nom d’un saint François d’Assise honteusement revisité, il ne s’agit plus de livrer bataille contre le péché qui nous coupe de Dieu, mais de fraterniser avec les créatures de façon totalement illusoire.

Suite à la Cop 21[1], les évangéliques et autres officines protestantes, ont suscité à grands renforts de communication, un engouement pour l’écologie qui a pénétré l’Église catholique et donné naissance au label « Église verte ». Cette mouvance christiano-paganisante dont les adeptes, délégués et spécialistes auto-proclamés prolifèrent dans maints diocèses, a au moins le mérite de révéler le degré de boboïtude atteint par des catholiques encouragés dans cette voie par un clergé d’une naïveté consternante.

Le label Église verte

Présentation

« Le label est un outil à destination des paroisses / Églises locales ainsi que des œuvres, mouvements, monastères et établissements chrétiens qui veulent s’engager pour le soin de la création. » [2]

Dès la présentation de l’écolabel, le ton œcuménique est donné : il s’agit d’une démarche à destination des Églises et autres « établissements chrétiens ». Pour rappel, tout catholique est chrétien mais tout chrétien n’est pas catholique et nourrit même parfois une hostilité viscérale envers le catholicisme et certains aspects fondamentaux de sa doctrine (sacrements, culte des saints et plus particulièrement de la Sainte Vierge, institutions ecclésiastiques etc.).

Comme il fallait s’y attendre, les « ressources » qu’Eglise verte propose dans son accompagnement de la conversion écologique (version écolo du très managérial « accompagnement du changement ») n’ont rien d’innocent : « éco-diagnostic » qui confirmera le gogo dans sa mauvaise conscience de parasite de la création et le rendra d’autant plus docile aux protocoles proposés par les « experts » ; outils de communication pour entretenir l’esprit d’appartenance à la communauté virtuelle (affiches, flyers et autres goodies personnalisés en plastique recyclable) ; « fiches techniques » (les processus) dont celles consacrées aux « célébrations et catéchèse » où la référence dominante est manifestement protestante.

En arrière plan

D’après ses « Mentions légales », le site www.egliseverte.org est la propriété d’
A Rocha France, antenne arlésoise de l’O.N.G. internationale du même nom, fondée en 1983 par le pasteur anglican Peter Harris [3], et aujourd’hui établie dans vingt pays du monde. A Rocha International est l’initiatrice d’Eco Church U.K. et d’Église verte à travers le monde.

Les « outils »

Revenons maintenant un peu plus en détail sur les « outils » proposés : tout d’abord l’éco-diagnostic. De façon très révélatrice, le questionnaire s’attaque immédiatement au spirituel : la doctrine, la liturgie, la prière et la prédication.

La célébration de certains dimanches est-elle particulièrement dédiée au respect de la création ?

Le respect de la création est-il un sujet de prière de la communauté ?

Le respect de la création est-il abordé dans les homélies ?

Selon ce prisme pagano-protestant, on en viendrait à reprocher aux Apôtres de n’avoir prêché et célébré que le Christ crucifié (1Corinthiens I, 23) : la Foi, l’Espérance, la Charité et tout ce qui se rapporte au Salut, bref le Ciel.

L’inspection se poursuit « dans le domaine spirituel » avec la catéchèse des enfants et des adultes, l’aumônerie, les divers groupes de formation doctrinale. Est-ce bien le lieu pour parler sacs poubelles ? Enfants et hommes en quête de sens ne devraient-ils pas plutôt y apprendre qu’ils sont sur terre pour connaître et aimer Dieu, vivre des sacrements institués par le Christ par amour pour nous, dans l’espérance du face-à-face éternel ? Mais le diagnostic préfère insidieusement recommander le témoignage de « chrétiens engagés » (y compris pendant les « célébrations » [4]) et la constitution d’un « groupe formel pour accompagner le processus Église Verte » [5], conformément aux techniques managériales les plus éprouvées.

Une fois le spirituel reformaté à la cause verte, l’éco-diagnostic passe aux oeuvres et à des considérations bien plus prosaïques, s’intéressant notamment au patrimoine immobilier et mobilier du « groupe » voire de ses membres. Il y a une différence entre s’assurer que les fenêtres du bâtiment sont bien isolées et poser des questions comme :

La communauté dispose-t-telle de bâtiments dont elle est responsable (église, temple, salles de réunion, bibliothèque, logement…) ?

Êtes-vous propriétaire de vos locaux ?

Votre communauté possède-t-elle un espace extérieur dont elle a la gestion ?

Il s’agit sans doute d’évaluer la capacité « missionnaire » de la communauté à la lumière des infrastructures dont elle dispose. Car pour mériter son label, le « groupe » doit être engagé sur le plan local (organisation d’échanges sur l’écologie entre citoyens, responsables politiques et associatifs ; repas à base de produits locaux etc.) et « global » (financement, individuel et communautaire, d’ONG « solidaires » et autres « fonds éthiques » [6]).

L’éco-diagnostic permet de discerner les engagements labellisés. Sauver le climat suppose ainsi de recourir aux énergies renouvelables, dont le solaire et l’éolien pourtant décriés du fait de leur atteinte aux paysages et aux sols comme de leur coût d’installation, de fonctionnement et de recyclage. De même, l’écolabel promeut la taxation carbone [7] au sujet de laquelle les Gilets jaunes, le reste de la France périphérique, et quelques scientifiques [8], auraient bien des choses à objecter.

Seront également passées en revue par l’écolabel la consommation d’électricité, de l’ampoule à la donnée numérique ; la consommation d’eau jusqu’à la chasse des toilettes ; la consommation de papier, de l’imprimante…au papier hygiénique ; et même la consommation de couverts « réutilisables », Église verte proposant dans ce domaine des gobelets en plastique affublé d’un logo ringard pour 0.50€ pièce. Le plastique serait donc désormais plus respectueux de l’environnement que le verre ! Coca-Cola devrait se réjouir de cette nouvelle ! [9]

Quoi qu’il en soit, Église verte pousse l’accompagnement jusqu’à proposer les services (gratis pro Deo ?) de Laura Morosini, « conseillère stratégique climat et développement durable », co-fondatrice de Chrétiens unis pour la terre et co-conceptrice du label Eglise Verte . On n’est jamais si bien servi que par soi-même mais un éventuel conflit d’intérêt ne semble pas avoir effleuré la Conférence des Évêques de France puisque que Madame Morosini est également membre de l’Antenne environnement de la CEF [10].

Petit détail qui reste à éclaircir : que deviennent les données de l’éco-diagnostic ? le site d’Église verte étant muet sur cette question et appartenant à A Rocha France, on peut supposer que ces renseignements sur les biens immobiliers et mobiliers des communautés voire de leurs membres sont conservés par l’ONG. Respectueuse du RGPD, celle-ci confirme que les données collectées par elle seront notamment employées à la collecte de fonds. L’écolabel, financé dans un premier temps par ses partenaires (Conseil des Églises chrétiennes en France, Fédération protestante de France, Conférence des évêques de France, Assemblée des évêques orthodoxes de France, CCFD, Secours Catholique etc.), est d’ailleurs supposé s’appuyer progressivement sur les « contributions volontaires des paroisses et structures labellisées ainsi que sur des donateurs » [11].

En fait, A Rocha se comporte comme une entreprise commerciale : elle se renseigne sur sa clientèle cible, ses ressources, ses habitudes de sociabilité et de consommation pour progressivement les orienter à son profit. L’ONG favorise ainsi la constitution d’un écosystème favorable à son développement dans un milieu culturellement opposé. En effet, l’ONG ne cache pas son appartenance à la mouvance évangélique ; or, Église verte ne compte qu’1% d’orthodoxes, un peu moins de 10% de protestants, et donc 90% de catholiques [12] habitués à rester sages pendant la tonte.

A ces catho-gogos dont on aura méthodiquement étudié le profil, on assignera le processus adapté de conversion à la nouvelle religion verte, leur soutirant au passage de l’argent qui aurait pu secourir les pauvres de la paroisse, contribuer à l’entretien des bâtiments de celle-ci voire aux charges diocésaines. Sous couvert d’œcuménisme et d’écologie, c’est une imprégnation de l’Eglise par une hérésie pagano-protestante [13], de la Messe jusqu’aux aspects les plus triviaux. Ainsi voit-on circuler dans des paroisses, en guise de méditations de Carême, des extraits de la règle de Reuilly à laquelle A Rocha se réfère très volontiers [14]. De même, grâce à Laura Morosini et ses Chrétiens unis pour la terre, les catho-bobos apprennent à « jeûner pour le climat » et « vivre pleinement » leur carême en « mangeant végétarien au quotidien » [15]. Ceci ne facilitera probablement pas l’évangélisation des éleveurs de bétail, bouchers et autres charcutiers [16]. Ainsi oublie-t-on un peu rapidement l’injonction divine à saint Pierre : « Tue et mange ! » (Actes de Apôtres, X, 13). De même, l’abstinence de viande le vendredi s’explique non par le rachat de notre mauvaise conscience de consommer des animaux au quotidien, mais par le désir de ne consommer que la Chair du Christ en ce jour commémorant Son sacrifice. Mais encore faudrait-il croire qu’il s’agit vraiment de Son Corps et de Son Sang, ce que des évangéliques nieront toujours farouchement.

La figure bafouée de saint François d’Assise

Saint François d’Assise doit avoir le dos bien large pour supporter le détournement de son exemple opéré par cette mouvance douteuse. Le Povorello reçut en effet de Dieu la grâce insigne de conformer sa vie à celle du Christ jusque dans sa chair. S’il appelait le soleil et le vent « frères », la pluie et même la mort « sœurs » ce n’était pas par mièvrerie mais en homme réellement accompli dans un haut degré de sainteté. Les éléments sont purs mais devenus hostiles à l’homme du fait du péché : la pureté de cœur (retrouvée) de saint François lui a permis de les apprivoiser. Il a connu, par une vie de pénitence, une vie sacramentelle intense, quelque chose de ce que nos premiers parents goûtaient de l’harmonie de la création avant le péché originel.

N’en déplaise à certains, c’est Adam qui sous le commandement de Dieu donna un nom à chaque plante et à chaque animal. Et Dieu dit : « Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la ; dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux qui rampent sur la terre » (Ge. I, 26). Cette terre signifie tout le créé, jusqu’à sa propre chair dont Adam devra se rendre maître par la pénitence, la tempérance. L’homme n’a pas à se prosterner devant les créatures jusqu’en faire des idoles mais à les dominer en fidèle intendant de Dieu, dépositaire et non propriétaire de la Création.

La figure de saint François nous invite comme lui à retrouver la pauvreté originelle, l’humilité profonde et vraie de tout recevoir gratuitement de Dieu. Souvenons-nous que saint François d’Assise, à la fin de sa vie, fut stigmatisé. Ce ne fût qu’à partir de ce moment qu’il atteint cette humilité, extraordinaire anticipation du royaume des Cieux [17]. Notre pèlerinage terrestre ne s’entend que dans l’ombre de la Croix, dans la libre participation aux souffrances du Christ, dans la reconnaissance de notre besoin d’être sauvés par Dieu et de recourir aux moyens qu’Il a Lui même institués à cette fin : les sacrements. Et l’usage de papier toilette recyclé ne changera rien à cela.

L’incompatibilité protestante

À titre de rappel, parmi les 95 thèses de Luther, on peut lire notamment :

En disant : Faites pénitence, notre Maître et Seigneur Jésus-Christ a voulu que la vie entière des fidèles fût une pénitence. (…) Cette parole ne peut pas s’entendre du sacrement de la pénitence, tel qu’il est administré par le prêtre, c’est-à-dire de la confession et de la satisfaction.

La transformation des peines canoniques en peines du Purgatoire est une ivraie semée certainement pendant que les évêques dormaient. (…) C’est pourquoi les prédicateurs des indulgences se trompent quand ils disent que les indulgences du Pape délivrent l’homme de toutes les peines et le sauvent.

Il apparaît ainsi clairement que l’écologie catholique est aux antipodes de ce que propose cet écolabel, véritable cheval de Troie d’une hérésie multiforme. Il ne peut y avoir de « conversion écologique » authentique et intégrale sans une foi orthodoxe nourrie d’une fréquentation assidue des sacrements. L’idéal de « paix et de solidarité avec la création » prôné par Église verte et ses avatars n’est pas sans rappeler celui de « paix universelle » auquel aspire le « mouvement panorganisationnel » dont nous dénonçons l’intrusion dans l’Église catholique [18] : doctrines hétérodoxes convergentes, mêmes origines anglo-saxonnes, même recours aux techniques managériales de manipulation des esprits, même propagande mondialiste, même stratégie de détournement des institutions ecclésiales etc. Bien entendu, une telle « Église » ne peut relever de la véritable Église du Christ et il est navrant de voir des catholiques, laïcs comme ecclésiastiques, y adhérer avec enthousiasme pour suivre l’air du temps.

Marie-Madeleine

[1] La COP est une conférence internationale sur le climat qui réunit chaque année les pays signataires de la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique (CCNUCC). Ces résolutions ne sont donc pas supposées absolument conformes à la conception catholique de la Création.

[2] Sauf indication contraire, les citations relatives à l’Eglise verte sont tirées du site https://www.egliseverte.org

[3] Portrait de Peter Harris sur le site d’A Rocha International

[4] Eco-diagnostic – « D3 : Notre communauté permet à des spécialistes de l’environnement de prendre la parole lors de célébrations. »

[5] Eco-diagnostic – A10

[6] Eco-diagnostic – D18 : « Notre communauté soutient financièrement une action de solidarité internationale » ; E10 : « L’investissement éthique de l’épargne personnelle est encouragé par notre communauté » ; E11: « Les fonds de notre communauté sont investis sur des fonds éthiques, (ex., compte courant ou investissements) »

[7] Eco-diagnostic – B2, B3, B4

[8] Sur la question du CO2 et l’urgence climatique en général, cf. notamment François Gervais, L’urgence climatique est un leurre, TV-Libertés, Zoom, 3 janvier 2019 ; Jean-François Auzolle, Réchauffement climatique : mythe et réalité, TV-Libertés, Politique & Eco n° 247 et 248

[9] Sur la pollution par le plastique même recyclable, cf. Cash Investigation – « Plastique : la grande intox »

[10] Site de Laura Morosini (conversionecologique.fr) – Accompagnement Vers une Eco-responsabilité Chrétienne (AVEC) – Qui suis-je ?

[11] Site Eglise verte – Contexte, organisation, finances

[12] Informations obtenues récemment du siège d’A Rocha France par contacts téléphoniques. L’actuel président d’A Rocha France, Paul Jeanson, est selon ses propres termes « issu du milieu catholique » et ne cache pas son appartenance à l’évangélisme (cf. Page Facebook de la Fédération Protestante de France (FPF) – Vidéo postée le 13 décembre 2019 : Paul Jeanson – A Rocha – Les évangéliques de la FPF)

[13] Cf. notamment les fiches de célébration d’Eglise verte dont la célébration de la « Saison de la Création » sur fond de liturgie adventiste ou « luthéro-réformée »

[14] Cf. Portraits de Frédéric et Geneviève Baumann, animateurs du Domaine des Courmettes, siège social et centre d’A Rocha France

[15] Cf. le site Carême pour la terre : « Dans l’esprit de l’encyclique Laudato si’ et la continuité des transformations à l’oeuvre [?], le mouvement Chrétiens Unis pour la Terre propose de redécouvrir la beauté du carême à travers un chemin sans viande et sans poisson »

[16] En fait, Eglise verte conduit au même travers que le label bio. Bien des paysans élèveront leurs bêtes naturellement, produisant ainsi une viande d’une qualité bien supérieure à celle labellisée « bio »qui aura pourtant du rentrer dans des normes onéreuses et contestables. De même, Eglise verte impose son idéologie, ses normes, ses méthodes, ses experts, aux « groupes » qui se sont laissés convaincre de la valeur de ce label.

[17] Pour aller plus loin sur saint François d’Assise, cf. notamment P. M.-D. Molinié, Le Cantiques des Créatures de saint François (3 instructions enregistrées – novembre 1977)

[18] Cf. Le Glaive de la Colombe, « Vous avez fait de la maison de mon Père une maison de négoce » et De l’Eglise managériale : la vie consacrée féminine